Le 30 juillet 2024 • Mis à jour le 26 août 2024
Article rédigé par Marie-Laure Vergain, Bureau d’Appui Territoire Engagé Transition Écologique.
Propos recueillis auprès de Rachel DE SOUZA, Responsable service prévention des déchets, Direction Prévention Collecte et Traitement des Déchets, Pôle Environnement et services publics, Grenoble-Alpes Métropole.
Le Cadran Solaire est un nouveau quartier d’environ 3 hectares, aménagé sur d’anciens terrains militaires.
Déclaré d’intérêt métropolitain en 2015, ce projet est coordonné par Grenoble-Alpes Métropole, labellisée 3 étoiles Économie Circulaire du programme Territoire Engagé Transition Écologique. Ce projet est valorisé dans l’action 1.2.2 « Mettre en place une transversalité des actions et des projets » du référentiel Economie Circulaire. D’après Rachel DE SOUZA, le programme Territoire Engagé Transition Écologique a été incitateur pour ce projet car il représentait l’opportunité de faire une opération pilote et éco-exemplaire de réemploi. Il représente une première expérience chiffrée de déconstruction sélective d’ampleur et un démonstrateur de territoire, dont le succès pourra être reproduit par la suite.
En 2022, Grenoble-Alpes Métropole a obtenu un prix Eurocity Awards pour ce projet, dans la catégorie dans la catégorie Lead together – Scalable solutions for positive climate impact (Mener ensemble - des solutions d'échelle pour un impact climatique positif). Ce prix est porté par Eurocities, une association qui regroupe 200 villes de 38 pays européens. Il récompense chaque année les réalisations exceptionnelles des villes membres dans la mise en œuvre d’activités ou de pratiques locales qui améliorent la qualité de vie des populations. En savoir plus : https://eurocities.eu/awards/
Ce projet permet à la fois une économie de foncier, dans l’esprit du Zéro Artificialisation Net (ZAN), la réutilisation de matériaux issus de la déconstruction, et une hybridation des espaces. En effet, ce nouveau quartier a pour ambition d’être mixte, ouvert, fonctionnel et partenarial. Il propose un Centre de Recherche (10 000 m2), 100 logements étudiants et de la restauration universitaire (4 000 m2), plus de 200 logements (14 400 m2), des équipements publics (300 m2), des commerces ou services (250 m2). Il propose également des jardins partagés.
L’évolution de l’occupation des espaces communs est optimisée au quotidien et à terme avec les prismes de la chronotopie, de l’hybridation des espaces, de la mutualisation et de la modularité.
La première phase est achevée !
Il s’agissait de l’étape de déconstruction puis reconstruction, pour les logements universitaires du CROUS et les locaux universitaires. Elle est le fruit de la collaboration de Grenoble-Alpes Métropole à travers sa cheville ouvrière qu’est l’Établissement Public Foncier du Dauphiné (EPFLD), la commune de la Tronche, l’Université (UGA) et le Centre Régional Œuvres Universitaires et Scolaires (CROUS) de Grenoble. La seconde phase sera l’étape de construction des logements sociaux et des locaux d’activité.
Le coût des travaux ? 165 000 € pour la déconstruction sélective de 8 100 m2 auxquels s’ajoutent des surcoûts liés aux diagnostics ressources et au temps supplémentaire passé par l’EPFLD et les maîtres d’œuvre.
Dans le cadre d’un contrat signé en 2018 avec l’ADEME, Grenoble-Alpes Métropole avait la volonté de travailler les déchets de la filière Bâtiments Travaux Publics. Le service prévention des déchets a répondu avec le service urbanisme à un appel à manifestation d’intérêt de l’ADEME en 2017 sur l’économie circulaire en urbanisme, afin de faire monter en compétence l’ensemble des acteurs sur ce sujet en lui permettant de bénéficier d’un accompagnement pendant un an par deux bureaux d’études.
Cela a également permis de fédérer les acteurs nécessaires à ce projet, et de travailler sur la gouvernance.
Pendant l’appel à manifestation d’intérêt, le chantier a démarré avec une petite étape de déplantation : une foire aux végétaux a été organisée par Grenoble-Alpes Métropole, avec le soutien des services techniques de la Tronche, afin de donner une seconde vie aux végétaux présents sur le site et éviter qu’ils soient détruits pendant les travaux.
La déconstruction a duré 8 mois, en 2021.
Il a fallu 70 % de temps supplémentaire pour effectuer un curage du site en incluant du réemploi pour la déconstruction sélective. Il n’y a pas eu d’impact sur le délai global du chantier car d’une part le phasage a été organisé pour que ce curage sélectif intervienne pendant des phases de chantier incompressibles (dont le désamiantage sur les autres bâtiments), et d’autre part une optimisation des cadences a été permise par l’attribution à la même entreprise de la prestation du curage et de la gestion du réemploi.
La déconstruction sélective a mobilisé 12 équivalents temps plein. Ce chantier de réinsertion a permis l’emploi de personnes jeunes, parfois très diplômés, qui se sont montrés intéressés par ces postes à contrat court, mais lié à un travail qui a du sens pour eux, celui de l’économie des ressources.
Le coût du réemploi n’était pas estimé au départ. La déconstruction a été plus chère qu’une déconstruction conventionnelle en raison du temps de travail supplémentaire. L’économie financière provient des inertes, réutilisés sur site.
Le bilan est positif : l’économie financière est de 40 % pour le projet global.
Les ressources récupérées sur le site ont été stockées pour être réemployées sur site ou vendues dans un magasin éphémère de vente, la Batitec, matériauthèque ouverte aux particuliers, aux professionnels (aménagement intérieur) et aux communes, dans un bâtiment conservé en bordure du site. L’EPFL a confié ce réemploi à Ecomat’38. L’information a été transmise par le bouche-à-oreille et par la communication faite autour du projet (FR3, TF1, France Bleu, réseaux sociaux…). Les acheteurs de la matériauthèque ont exprimé un choix de changement, au-delà du coût avantageux par rapport à du neuf.
Les inertes et les bétons de type dalles ont été réutilisés sur place pour le terrassement.
320t de matériel ont été collectées. Une grande partie des pierres ont été réutilisées pour le projet d’aménagement pour les murs d’enceinte par exemple, ou encore 50 tonnes de tuiles et 70 tonnes de bois.
Le gain écologique est estimé à 373t équivalent carbone.
Cette expérimentation a été une occasion pour la Métropole d’enclencher un nouveau modèle de déconstruction.
Quelques facteurs de réussite pour un projet de réaménagement urbain
Quelques points de vigilance
La matériauthèque était portée par Eco’Mat 38. Le modèle économique est conçu pour une plateforme centralisée. Une réflexion est en cours pour une mise en réseau des matériauthèques à l’échelle régionale.
Le réemploi est maintenant un volet de la feuille de route bâtiment durable de la Métropole, mise en œuvre par tous les chargés d’opération.
La seconde phase de l’aménagement du quartier va démarrer. Elle est portée par un aménageur public, la SPL SAGES, et concerne la transformation de bâtiments existants en logements sociaux.
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