Panorama de la ville de Digne-les-Bains, ville-centre de Provence Alpes Agglomération
Crédit photo : Laurence Poulange

Provence Alpes Agglomération engagée pour une démarche de fond sur sa transition écologique

Le 6 juin 2024 • Mis à jour le 24 juin 2024

Provence Alpes Agglomération : « Le programme Territoire Engagé Transition Ecologique est une communauté privilégiée qui nous relie à d’autres collectivités motrices, mais aussi une démarche de fond qui imprime toute notre politique et sert notre marque employeur. »

Alexandra David-Neel est l’une des grandes figures tutélaires de Digne-les-Bains, chef-lieu du département des Alpes de Haute-Provence, où elle est décédée, en 1969. Orientaliste, chanteuse d'opéra, journaliste, écrivaine, grande voyageuse, féministe et anarchiste, cette intrépide est surtout connue pour avoir été, au mitan des années ‘20, la première femme occidentale à atteindre Lhassa, capitale du Tibet, alors interdite aux étrangers.

Cent ans plus tard, ce tempérament volontariste et pionnier imprime encore la politique dynamique et écoresponsable conduite par Provence Alpes Agglomération (46 communes – 47.000 habitants). Entre champs de lavande, thermes et pistes de ski, ce territoire de nature et de culture, où il fait bon vivre et entreprendre, se révèle aussi un espace particulièrement exposé au changement climatique et à ses conséquences, à préserver.

C’est donc avec une forme d’évidence que nous avons donné rendez-vous, au pied de la maison de l’exploratrice, à Sandrine COSSERAT, Vice-Présidente à la Transition écologique et Cécilia CHEVALIER, Directrice générale des services, pour évoquer ensemble le contenu du programme Territoire Engagé Transition Ecologique dans lequel la collectivité s’est inscrite en 2021, ainsi que le Contrat d’Objectif Territorial (COT) qui la lie à l’ADEME dans ce cadre.

Une rencontre inspirante avec deux femmes déterminées. Morceaux choisis.

En octobre 2020, les élus du Conseil d’Agglomération de Provence Alpes Agglomération ont adopté à l’unanimité un texte de Déclaration d’état d’urgence climatique. Pourquoi cette démarche ?

Sandrine COSSERAT : Il était, pour Patricia GRANET-BRUNELLO, la Présidente et pour tous les élus, absolument essentiel de reconnaître publiquement l’ampleur du problème auquel notre territoire était confronté. En effet, la Méditerranée et les Alpes comptent parmi les régions les plus vulnérables au changement climatique et les conséquences de ce dérèglement ont une traduction de plus en plus perceptible dans notre quotidien bas-alpin : canicules, pluies torrentielles, glissements de terrain, inondations … Nous, agglomération, comme les autres collectivités locales, détenons un rôle moteur majeur dans la mise en œuvre de la transition écologique dans nos territoires, ne fut-ce qu’à travers notre devoir d’exemplarité. Il nous fallait l’affirmer.

Précisément, le programme Territoire Engagé Transition Ecologique est l’outil opérationnel de planification écologique proposé par l’ADEME aux collectivités désireuses de concrétiser ce changement. Il rassemble aujourd’hui plus de 500 territoires, dont Provence Alpes Agglomération. Que vous apporte cette dynamique d’envergure ?

Sandrine COSSERAT : Par mon parcours professionnel puis électif, je suis très proche de l’ADEME depuis longtemps. Avec toute l’équipe de la Direction régionale, nous sommes dans une relation professionnelle et humaine très qualitative. Mon engagement pour la transition écologique dans mon village de Volonne était connu et j’avais déjà été invitée à en témoigner publiquement à plusieurs reprises. En 2017, l’Agglomération a été créée et, à partir de 2020, j’ai pris la vice-présidence à la transition écologique. C’est à ce moment-là que le Contrat d’Objectif Territorial nous a été proposé. Reconnaissons-le : la finalité du dispositif n’était pas tout à fait claire pour nous à l’époque, mais nous avons su saisir l’opportunité, sachant qu’elle nous apporterait une ambition et des moyens.

Cécilia CHEVALIER : Pour moi, les élus de Provence Alpes Agglomération ont un vrai courage politique. Je les vois s’engager sans réserve dans des projets qui sont souvent impopulaires dans un premier temps. La modification de l’organisation de la collecte des déchets, la tarification incitative, par exemple, sont des sujets sur lesquels les citoyens ne sont pas tous spontanément enthousiastes, il faut le dire. Pour autant, le territoire a besoin d’avancer et les élus ont une vision qui va au-delà de leur mandat. Ils comprennent aussi que, tant qu’à devoir y aller, autant le faire les premiers. Certes, il s’agit alors d’essuyer les plâtres. Mais c’est stimulant intellectuellement et cela permet souvent de bénéficier d’un accompagnement et de financements dédiés qui compensent le risque pris. Par de multiples côtés, c’est bien d’être un peu des pionniers, en fait.

Photo de Sandrine COSSERAT et Cécilia CHEVALIER

De gauche à droite : Sandrine COSSERAT, Vice-Présidente déléguée à la transition écologique et citoyenne et Cécilia CHEVALIER, Directrice générale des services. Crédits photos : Nathalie RICAILLE

Etoffer le service dédié à la conduite du programme Territoire Engagé Transition écologique

Le soutien apporté par l’ADEME vous a permis, entre autres, d’étoffer le service dédié à la conduite du programme et de consolider sa formation. C’était important pour pouvoir faire une vraie différence sur le terrain ?

Sandrine COSSERAT : Quels que soient les services, nous avons la chance d’avoir des équipes qui ont à la fois des compétences, des convictions et des valeurs. Pour autant, même en étant cohérents et très agiles, il y a un travail monstre derrière le montage et la conduite d’un programme tel que Territoire Engagé Transition Ecologique. Il nous fallait donc effectivement renforcer l’attelage si nous voulions monter en puissance. Dès que nous avons eu l’assurance d’être financés par le biais du COT, nous avons lancé un recrutement. Nous avons ainsi retenu la candidature de Mathilde Jimenez, qui est venue épauler Nicolas Maurel, le chef du service Transition écologique. Une très bonne pioche, je dois dire ! (rires) Par ailleurs, au-delà de l’humain, il y a aussi de la méthode, et ce n’est pas négligeable. Cette méthode se nourrit évidemment des outils qui nous sont proposés par l’ADEME dans le cadre du programme et de la bonne utilisation que nous en faisons.

On sent une complicité forte entre les élus et les services, qui avancent main dans la main dans l’opérationnalisation du programme. Vous confirmez ?

Cécilia CHEVALIER : Notre territoire permet, en tout cas, un circuit court de la décision. De la prise de conscience au plan d’actions, cela va, somme toute, assez vite et de manière relativement simple et pragmatique. C’est vrai pour les relations territoriales mais aussi pour l’Agglomération qui est à leur image. Les chargés de mission sont assez proches des Directions. Il n’y a pas quinze échelons entre le jeune chef de projet qui phosphore et les instances décisionnelles. C’est motivant, je pense. Car, comme toutes les collectivités territoriales, nous sommes en grande difficulté pour recruter. Les financements, dispositifs de formation et opportunités de labellisation liés au programme Territoire Engagé Transition Ecologique permettent donc aussi d’attirer et garder de jeunes talents dans nos territoires où ils ne viendraient pas spontanément. Traditionnellement, nous arrivaient les jeunes chargés de mission amoureux de parapente, de VTT, de sports outdoor. Mais ce n’est plus suffisant. Aujourd’hui, il y a beaucoup de jeunes qui sont très sensibilisés aux enjeux de la transition écologique et qui recherchent un emploi qui soit en accord avec leurs valeurs. Du coup, notre engagement public fait écho à ces attentes, à ces aspirations, et il rassure aussi sur le fait qu’il ne s’agit pas de récupérer ces jeunes en mode « greenwashing ». Pour le dire autrement, le programme Territoire Engagé Transition Ecologique sert clairement notre marque employeur.

L’obtention de 2 étoiles sur le volet Climat-Air-Energie

Vous venez d’évoquer le dispositif de labellisation lié au programme Territoire Engagé Transition Ecologique. A l’heure d’écrire ces lignes, Provence Alpes Agglomération a déjà décroché 2 étoiles sur le volet Climat-Air-Energie. En quoi est-ce important d’être ainsi distingués ?

Sandrine COSSERAT : C’est une façon d’évaluer notre action de manière objective à travers les référentiels qui sont communs à tous les territoires engagés. C’est aussi une manière d’entrer dans une communauté privilégiée qui autorise des contacts nombreux et qualitatifs, que ce soit avec d’autres territoires ou avec les services de l’ADEME. Enfin, l’annonce d’une étoile supplémentaire ou la remise d’un trophée, c’est l’occasion de communiquer, d’organiser une conférence de presse, de rédiger un article dans notre magazine communautaire… A chaque fois, c’est un coup de projecteur bienvenu qui participe clairement à l’émulation interne. A titre personnel, je repars systématiquement reboostée de ce genre de temps fort. C’est motivant et inspirant. On se sent concrètement acteur de la transition écologique à ce moment-là. On se dit que, comme le colibri, on fait notre part et ça se voit.

Je découvre l’outil de pilotage

Arrêtons-nous un instant sur la gouvernance du programme. Pour vous, cette démarche n’a-t-elle de sens que si elle est transversale ?

Sandrine COSSERAT : Un pilotage qui serait porté uniquement par l’élue à la transition écologique ne serait pas très intéressant. Tous les élus associés, de près ou de loin, à la mise en œuvre du COT doivent le porter également. Il n’y a pas encore si longtemps, nous pouvions peut-être, au sein du service Transition écologique, nous sentir un peu à part, avec notre feuille de route propre. Mais aujourd’hui, nous avons vraiment l’impression, à travers l’implémentation du programme Territoire Engagé Transition Ecologique, d’avoir mis en place une dynamique forte qui emmène tout le monde. Il n’y a plus un élu, plus un service qui ne soit pas concerné par les actions relatives au climat, à la qualité de l’air ou à l’énergie, par exemple. Dans les décisions que prennent les uns et les orientations que conseillent les autres, ça infuse. On voit bien que l’appropriation commence à se faire sentir et qu’elle imprime toute la démarche de la collectivité.

Cécilia CHEVALIER : A cet égard, le bureau communautaire est devenu le noyau dur de suivi et de décision, soutenu par les travaux de la Commission Environnement-Déchets, qui est très active. Au-delà des élus qui siègent classiquement au bureau, des conseillers communautaires (souvent issus de nos plus grosses communes) composent aussi cette commission. A ce titre, et en plus de nos vice-présidents, ils constituent les principales courroies de transmission de l’information relative à l’état de déploiement du COT, au plus près du terrain.

L’agglomération, positionnée comme un « bureau d’études » pour ses communes

En matière de transition écologique, Provence Alpes Agglomération met aussi régulièrement de la ressource humaine à disposition de ses communes. C’est un besoin important au niveau local ?

Cécilia CHEVALIER : Absolument ! Car si les communes ont envie de faire des choses, d’avancer vers des pratiques plus vertueuses, elles n’en ont pas forcément les moyens : pas ou peu d’ingénierie disponible en interne pour qualifier les besoins ou rédiger les termes d’un cahier des charges, par exemple, mais aussi une capacité parfois faible à mobiliser des sources de financement. C’est là que l’Agglomération a un vrai rôle à jouer. Pour tout ce qui ressort de la maîtrise de l’énergie, entre autres, nous nous positionnons donc comme un « bureau d’études » pour nos communes. C’est pleinement compatible avec l’engagement que nous affichons à travers le programme Territoire Engagé Transition Ecologique.

Sandrine COSSERAT : Aller à la rencontre de nos communes sur le sujet de la transition écologique fait intrinsèquement partie de notre méthode de travail. Pour ne citer qu’un exemple, je peux évoquer le « Tour Transition », que nous avons imaginé collectivement. Concrètement, l’idée était d’organiser un temps dédié avec les élus et les techniciens de nos communes membres pour rendre ceux-ci pleinement conscients du fait qu’ils étaient intégrés à la dynamique mise en place par Provence Alpes Agglomération à partir du moment où l’état d’urgence climatique avait été déclaré sur le territoire. Pour le PCAET, nous avions ainsi la volonté d’expliquer ce qu’était ce dispositif de planification et quel serait le rôle de chacun dans l’aventure : ce que l’Agglomération s’était engagée à faire, mais aussi tout ce que les communes pouvaient entreprendre de leur côté pour être réellement contributrices à la réalisation du Plan.

Je veux en savoir plus sur les accompagnements

Ecrire la feuille de route sur le volet économie circulaire

Sur tout ce qui ressort de l’économie circulaire, en revanche, Provence Alpes Agglomération partait d’une feuille blanche ou presque…

Sandrine COSSERAT : C’était effectivement un concept qui n’était pas très connu chez nous. Notre inscription dans le programme de l’ADEME nous a donc permis de bénéficier de plusieurs séances de sensibilisation et d’acculturation à la thématique sous forme de webinaires à destination des agents et des élus. Les vice-présidents en charge du projet alimentaire territorial et des déchets, notamment, étaient présents. Cela nous a tous largement aidés à « atterrir » sur ce thème complexe. Mais ce qui a été fondateur, c’est peut-être aussi la formalisation d’une délégation à l’économie circulaire au sein de notre bureau politique, avec la particularité que cette compétence nouvelle est venue s’adosser à une vice-présidence déléguée à l’attractivité du territoire et à la stratégie économique. En effet, en tant que collectivité, nous pouvons être exemplaires dans notre politique d’achats, dans notre politique de réutilisation, bien entendu. Mais le vrai levier, en matière d’économie circulaire, reste, pour nous, du côté des entreprises. Si nous réussissons à mettre en place des dynamiques d’écologie industrielle et territoriale dans nos parcs d’activités, nous pourrons ainsi décupler l’impact.

Le réseau Elus pour agir pour rassembler les élus pour l’accélération de la transition écologique

Pour conclure cet entretien, évoquons le nouveau réseau « Elus pour agir » déployé par l’ADEME. Cette initiative a pour but de rassembler les élus engagés pour l’accélération de la transition écologique dans leur territoire et de faciliter leur passage à l’action en ce sens en leur offrant des éclairages de contenu ainsi qu’un accompagnement sur mesure. En quelques mois, plus de 2 000 élus ont rejoint le mouvement … dont vous, Sandrine Cosserat. Pourquoi ?

Sandrine COSSERAT : C’est normal d’être sollicitée pour témoigner et contribuer à des dynamiques collectives. C’est aussi le sens de l’engagement d’un élu. C’est le sens du mien, en tout cas. Je fais de la politique pour faire avancer la transition écologique. Donc, oui, je reçois régulièrement des universitaires, des scolaires, d’autres élus ou bien j’organise des visites-découverte comme le Tour Transition que j’évoquais tout à l’heure, par exemple … et je continue à le faire avec plaisir. Au moment de rejoindre le réseau « Elus pour agir », j’ai un peu hésité, soyons francs, car je suis déjà bien occupée par mes mandats, au niveau municipal et intercommunal. Par ailleurs, de nombreux autres réseaux existent, au niveau national mais aussi au niveau régional, auxquels je contribue ainsi que la collectivité. Mais comme je suis curieuse (rires), je me suis inscrite quand même, d’abord pour voir ce dont il s’agissait concrètement. Après, on verra quelle plus-value cette activité nouvelle peut m’apporter, et ce que je peux apporter aux autres à travers mon inscription dans cette dynamique. A ce stade, il est trop tôt pour le dire, et j’attends de voir ce qui me sera proposé. Sera-t-on sur des temps interactifs ou descendants ? Y aura-t-il réellement une montée en puissance proposée, même pour des élus déjà aguerris aux thèmes de la transition écologique ? On verra ! Une suggestion, tout de même : j’apprécie beaucoup les formats de type « Décryptage » qui sont déjà proposés aujourd’hui, notamment par la DR PACA. Ils permettent de zoomer sur certains sujets émergents pour lesquels nous avons encore besoin de clés de compréhension. Un thème qui pourrait s’y prêter parfaitement, c’est celui de la sobriété foncière, par exemple, ou du budget vert qui va nous être imposé sous peu à travers la réforme de la nomenclature comptable.

Cécilia CHEVALIER : Pour aller dans ce sens, je voudrais aussi ajouter qu’il est souvent facile de se mettre d’accord sur les grands principes, lorsque l’on aborde un sujet de manière théorique. Mais dès qu’il s’agit de mettre en œuvre, la question de la complexité s’impose, et il est nécessaire d’en tenir compte, à mon sens, dans le cadre des activités du réseau « Elus pour agir ». Je serais très déçue de recevoir un catéchisme aveugle ou une grille de lecture unique, vue de Paris ou de Marseille. Les territoires sont tous différents et font face à des contraintes dont certaines sont spécifiques. Une solution hors sol n’est jamais une bonne solution. La transition écologique ne sera opérante que si l’on tient compte de la complexité.

Propos recueillis par Nathalie Ricaille.

Invitation à cliquer sur l'image pour rejoindre le réseau Elus pour agir