Communauté de communes de Granville Terre & Mer : une « Green destination » qui mise sur la transversalité pour opérationnaliser la transition écologique

Le 7 juin 2024 • Mis à jour le 9 juillet 2024

Granville Terre & Mer est une communauté de communes située dans le département de la Manche, face à la somptueuse dentelle de granite constituée par l’archipel normand de Chausey, témoin des plus grandes marées d’Europe. Son territoire est un bassin de vie dynamique et cohérent de 47 000 habitants, organisé autour de sa ville-centre : la cité portuaire de Granville et sa belle enceinte fortifiée sur les hauteurs.

Il n’est pas étonnant, dès lors, que l’office du tourisme local ait franchi, en octobre dernier, le seuil Or dans la certification Green destinations, un label international prestigieux accrédité par les Nations-Unies, qui reconnaît les efforts pour un développement durable du voyage et du tourisme.

Car Granville et ses environs « racontent à eux seuls les tournants majeurs des cinq derniers siècles de l’histoire de France » : guerres, essors et crises économiques, grande pêche morutière, révolution française, naissance de la villégiature balnéaire…
C’est encore le cas aujourd’hui, nouvelle période charnière, qui voit le territoire s’engager résolument dans la transition écologique, à travers la mobilisation active des élus et agents de la collectivité dans le cadre du programme Territoire Engagé Transition Ecologique porté par l’ADEME.

Faire de la transition écologique une grille de lecture pour l’ensemble des projets de la communauté d’agglomération

Entamé en 2021 à la signature d’un contrat avec l’ADEME, ce travail a fait apparaître la nécessité, pour obtenir des résultats probants, de faire de la transition écologique une véritable grille de lecture pour l’ensemble des projets à développer et à conduire.

Pour cela, les fondations étaient posées : depuis plusieurs années, par exemple, les agents de Granville Terre & Mer sont formés au mode projet. « Dans ce cadre », indique Agnès-Anne JOUBERT, Directrice Générale des Services, « nous avons mis en place une revue de projets qui rassemble, de manière bimestrielle, les chefs de service et les chargés de mission. L’objectif ? Faire des états d’avancement réguliers des initiatives en émergence ou en cours de vie. Cela aide évidemment chacun à mieux savoir ce qui se passe dans les services voisins. C’est, par ailleurs, particulièrement utile dans la mesure où nous travaillons sur plusieurs sites dispersés sur le territoire. »

Des réunions sont aussi convoquées par projet : « Chaque partie prenante y apporte son expertise et son regard au pilote. Certes, c’est plus classique, comme configuration, mais cela reste très pertinent lorsque c’est réellement un processus dynamique et vivant, ce qui est le cas chez nous » complète la DGS.

Pour autant, et malgré la volonté forte de l’encadrement, changer de logiciel ne va pas de soi : « Nous restons une administration française, c’est-à-dire avec un fonctionnement par défaut qui demeure celui du silo » reconnaît Candice DOLIGE, Chargée de mission Transition écologique. « S’il est vrai que cette nécessité d’une approche transversale est maintenant bien intégrée par les différents chefs de service, ce n’est pas forcément le cas pour tous les collègues. Le vieux réflexe, encore aujourd’hui, consiste souvent à se donner l’information lorsque l’on a terminé le travail. Mais évidemment, à ce moment-là, c’est trop tard. »

Multiplier les occasions de se rencontrer, pour s’acculturer à la transversalité

La mise en œuvre progressive du programme Territoire Engagé Transition Ecologique constitue, dès lors, une opportunité nouvelle pour emmener élus et agents dans une aventure commune passionnante, faisant de la transition écologique une véritable colonne vertébrale pour l’action. Et cela, la collectivité l’a bien compris.

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Ainsi, une revue spécifique des projets de transition écologique existe, complémentairement à la revue de projets globale évoquée précédemment. Elle permet, notamment, aux agents actifs sur les entrées « santé », « alimentation » ou « mobilité » de s’y rencontrer et d’apprendre à travailler ensemble. Un réseau interne de référents « transition écologique » a également été installé, qui booste, par ailleurs, la dimension éco-exemplaire de la collectivité : « nous avons réuni un groupe d’agents intéressés par le sujet bien qu’il ne soit pas central dans leur mission. Ainsi, ils peuvent échanger leurs visions, et notamment, discuter de la manière dont le thème s’incarne dans la vie quotidienne au travail » explique Candice DOLIGE.

Aller chercher la parole de chacun sur un sujet qui concerne tout le monde

Une enquête en ligne sur les pratiques d’éco-gestes au quotidien a été réalisée en fin d’année dernière, de même qu’un état des lieux physique dans les 16 principaux sites dans lesquels sont basés les agents. « Aller chercher la parole de chacun sur un sujet qui concerne tout le monde, en étant à la fois très concrets dans les constats posés et force de proposition pour l’avenir, c’est jongler avec les différentes échelles d’intervention pour faire sens. Nous essayons de plus en plus de favoriser ce type de méthode de travail aussi parce qu’elle constitue un élément de motivation et de mobilisation sur le long terme » conclut, déterminée, la chargée de mission Transition écologique. ** Croiser les expertises pour avancer plus vite et mieux sur le volet « Economie circulaire » du programme**

Au moment de mettre en chantier la phase de diagnostic sur le volet « économie circulaire » du programme Territoire Engagé Transition Ecologique, cet état d’esprit et ces nouvelles manières de faire ont apporté une réelle valeur ajoutée à l’exercice, sur un thème alors encore non défriché par la communauté de communes.

Par exemple, lorsqu’il s’est agi d’initier des contacts avec les nombreux acteurs professionnels qui maillent le territoire, des représentants du service Développement économique ont été systématiquement présents et actifs. « Cette implication a permis d’entrer dans le sujet en bénéficiant déjà d’un carnet d’adresses solide et d’une vision claire sur la diversité des entreprises présentes au sein de nos communes…. bref, d’un regard de type économique qui était tout à fait complémentaire à notre approche orientée ressources » souligne Candice DOLIGE.

Identifier les besoins des entreprises sur la transition écologique

Plus tard, des ateliers collectifs ont été organisés pour définir plus précisément les besoins des entreprises et identifier des pistes d’actions potentielles. A nouveau, la mobilisation du service Développement économique s’est avérée très précieuse. « D’autant qu’avec notre casquette « déchets », nous sommes parfois mal vus des entreprises » reconnaît volontiers Marine DESLANDES, Chargée de mission Economie circulaire et Responsable Prévention des déchets. « Souvent, nous sommes davantage assimilés à un service qui réclame une contribution financière qu’à un service qui aide à créer de la valeur pour l’entreprise. Le rapport au service « développement économique » est très différent. Certains entretiens ont donc été réalisés en binôme, et en présence d’un représentant du bureau d’études qui nous a aussi accompagnés dans cette étape importante du travail. »

Impliquer les chargés de mission et les agents au service de la transition écologique

Et les élus dans tout cela ? Ma foi, ils ne sont pas en reste. Bien au contraire : « Cela n’a pas toujours été le cas, vu l’encombrement des agendas, mais à chaque fois que cela a été possible, les élus ont également assisté aux entretiens avec les acteurs économiques. Quand le vice-président au Développement économique et le vice-président à la Transition écologique sont autour de la table en face d’un interlocuteur privé, cela a beaucoup de sens et de poids » explique ainsi Didier LEGUELINEL, Vice-Président à la Transition écologique.

C’est aussi – soulignons-le en passant – à travers l’implication des élus que le lien est fait avec la Ville de Granville sur le volet Climat-Air-Energie. « Sans eux, cela ne pourrait pas fonctionner, même avec des moyens humains techniques à disposition en suffisance » juge Candice DOLIGE qui sait de quoi elle parle, puisqu’elle partage son temps de travail de manière équivalente entre la communauté de communes et la Ville.

Travailler en inter-commissions pour polliniser les idées et les argumentaires, au bénéfice de la transition écologique

Plus largement, c’est la gouvernance de l’ensemble du programme Territoire Engagé Transition Ecologique qui est positivement impactée par cette mise en transversalité de la réflexion et de l’action.

« Pour ce qui est du pilotage politique, nous nous appuyons sur des multi-commissions » continue le vice-président. « Au-delà des services, c’est important que chaque élu ne demeure pas, lui non plus, dans le carcan de sa propre délégation. Dès lors, nous essayons de faire en sorte, à chaque fois qu’un sujet jugé transversal est évoqué, de réunir les différentes commissions concernées. C’est quelque chose que nous faisons assez régulièrement, pour tout projet d’importance. Cela permet aux membres de la commission « Développement économique », par exemple, d’avoir des échanges directs avec ceux de la commission « Finances », de la commission « Transition écologique », de la commission « Déchets », etc. » Cette manière d’opérationnaliser une gouvernance décloisonnée possède aussi d’autres avantages sur lesquels Didier LEGUELINEL met facilement le doigt, par expérience : « Lorsqu’une commission commence à ronronner, on bascule vite dans l’entre-soi. Les élus sont réunis dans les commissions, a priori par sujets d’appétence, c’est-à-dire qu’ils se retrouvent entre convaincus d’un certain modèle. Du coup, le fait de réunir plusieurs commissions en même temps permet de trouver de nouvelles accroches auprès d’autres élus, de construire des argumentaires inédits. Le débat s’en trouve considérablement enrichi et les élus concernés avancent dans leur acculturation aux thématiques qu’ils ne portent pas en propre. Dès lors, la conclusion s’impose : « En se connaissant mieux, on se comprend mieux aussi. Au bout du bout, chacun progresse. Pour ce qui est de notre projet politique, je crois que l’on tient là, vraiment, l’une des manières de faire qui a le plus gros potentiel de faire bouger les lignes. »

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Décrocher ses premières étoiles au tableau de labellisation du programme Territoire engagé Transition Ecologique

Résultat des courses ? Elles bougent plutôt bien, ces lignes, puisque Granville Terre & Mer peut aujourd’hui se targuer d’avoir décroché ses deux premières étoiles au tableau de labellisation du programme Territoire Engagé Transition Ecologique, l’une sur le volet Economie circulaire, l’autre sur le volet Climat-Air-Energie.

A côté de cela, évoquons également le label Green destinations, décroché en octobre 2023 : « nous sommes le deuxième territoire français à l’avoir obtenu et nous en sommes très fiers » se réjouit Candice DOLIGE. « C’est un label touristique mais pas uniquement. Il s’appuie aussi sur d’autres composantes de l’action territoriale, dont la dimension de transition écologique » précise Agnès-Anne JOUBERT. « Ce sont donc en partie les actions mises en œuvre dans le cadre du programme porté par l’ADEME qui nous ont permis d’aller cocher des cases supplémentaires et, dès lors, de faire une différence. L’office du tourisme a ensuite valorisé ce travail avec des contributions issues d’autres acteurs, pour prendre en compte l’ensemble des enjeux… et voilà !»

Entretenir la relation élu-technicien pour booster la créativité et démultiplier les impacts

Au-delà de ce qui précède, l’on pourrait être tentés d’attribuer ces succès à l’ampleur de l’équipe technique à la manœuvre pour le déploiement du programme, qui permet d’avancer vite et bien : le contrat avec l’ADEME, « ça nous oblige, mais ça nous donne aussi des moyens. Par exemple, les moyens humains que nous avons choisis d’affecter au développement du volet « économie circulaire » en positionnant 2 personnes au pilotage (Candice DOLIGE et Marine DESLANDES, ndlr) et en leur offrant des moments de formation dédiés viennent du contrat d’objectif territorial. C’est une condition-clé pour atteindre nos ambitions » mesure avec lucidité Didier LEGUELINEL.

D’aucuns évoqueront aussi la grande proximité qui lie l’élu référent à cette équipe technique. « Certaines semaines, il arrive que le vice-président et nous, nous nous voyions tous les jours pour travailler ensemble. Nous sommes en communication constante et cette relation se déploie naturellement, sans formalisme particulier. Tout est sujet à co-construction et il n’y a pas non plus de sujets tabous entre nous. La liberté de parole est totale, des deux côtés. C’est très appréciable » estime Candice DOLIGE. « Pour un technicien en général, c’est toujours facilitant quand un élu est impliqué dans le contenu et porte une parole forte. C’est même l’une des clés de la réussite » ajoute en écho Agnès-Anne JOUBERT.

Nourrir le réseau régional pour faire avancer la Normandie

Un modèle de fonctionnement inspirant à exporter ? « C’est vrai que je suis de plus en plus sollicitée par d’autres territoires qui veulent s’inspirer de ce que nous avons fait » admet Candice DOLIGE. Mais si c’est une belle reconnaissance, c’est aussi un piège dans la mesure où ces contacts sont très chronophages et que je manque déjà de temps pour faire advenir tout ce qui est encore dans les cartons » explique, à regret, la chargée de mission Transition écologique.

En revanche, Granville Terre & Mer est bien représentée lors des réunions de réseau organisées par la Direction régionale Normandie de l’ADEME, à destination des territoires porteurs de contrats signés avec l’Agence : « Ces rencontres-là ont vraiment du sens, puisque toutes les collectivités présentes passent par les mêmes étapes de travail. Et puis, c’est toujours utile d’échanger avec d’autres EPCI sur des problématiques communes qui sont travaillées au même moment » conclut-elle.

Ce n’est pas l’ADEME qui la démentira.

Propos recueillis par Nathalie Ricaille.

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